Méthanisation : « Gardez votre indépendance »
Mardi 17 novembre, dans le cadre des journées du collectif
EnRa 53, la SAS Méthamaine proposait une visite
de son unité collective de production de gaz méthane
à Meslay-du-Maine. Benoit Dutertre et Yves Lancelin,
deux des onze associés, ont reçu un groupe de cinq
agriculteurs engagés dans des projets de méthaniseurs
collectifs dans le nord de la Mayenne. L’occasion de faire
un point, à près d’un an de fonctionnement.

C’est en février dernier que le méthane de Méthamaine été injecté pour la première fois dans le réseau gaz de ville de Meslay-du-Maine. Comme s’est déroulée cette première année ?
Benoit Dutertre : Économiquement, on est très satisfait de cette première année de fonctionnement. La trésorerie est très bonne. On termine un chantier de 5 M€ sans dépassement. On a pu lancer l’exploitation avec de la trésorerie. On a bien géré les budgets travaux. On avait de bons partenaires dans le développement, comme dans la phase travaux.
Et techniquement ?
B.D. : On a eu un été compliqué. En été, le principal consommateur c’est la laiterie Perreault. Pour optimiser ses consommations de gaz fossiles, la laiterie regroupe ses appels de gaz. Pour nous, c’est compliqué. Quand Perreault appelle beaucoup de gaz, on ne peut pas suivre. Quand Perreault n’a plus besoin de gaz, on sature le réseau. Cet été, la disponibilité d’injection sur le réseau était trop fluctuante, cela impactait le fonctionnement de notre poste d’épuration de gaz et du poste d’injection Grdf. On ne pensait pas avoir autant de problèmes.
Comment avez-vous réagi ?
B.D. : On a répondu à un appel à projets lancé par Grdf, Flores 2, dont l’objectif vise à mieux faire coïncider les besoins des réseaux de gaz et la capacité de production des unités de méthanisation. Pour cela, on travaille sur l’installation d’un compresseur et d’un réservoir de gaz en aval de notre poste d’injection qui puisse faire tampon pour la laiterie Perreault. Quand la laiterie aura des besoins supérieurs à notre capacité de production, la réserve prendra le relais. L’objectif est que cela soit en place début juin.
D’autres projets pour 2021 ?
B.D. : L’objectif de 2021 est d’optimiser le fonctionnement de notre unité au quotidien. Pour être le plus efficace possible quand on est sur le site. Je pense au temps de transfert de la matière, de toute la préparation, du temps de chargement dans le méthaniseur… Il faut que l’on raccourcisse ces temps-là. Après, il y a toute la période d’astreinte. Il faut qu’en astreinte on ait le minimum de dérangement. Ce sont des choses à améliorer. Nous avons aussi en projet d’optimiser la logistique.
Vous avez aussi ouvert les portes au public en septembre…
B.D. : Oui, on a reçu 700 personnes ! Des gens très intéressés. On a eu zéro critique sur notre site. On a eu des questions sur les risques, sur les odeurs… On était en mesure d’expliquer toutes ces choses-là. Les gens ont compris qu’en cas d’incident technique, la bâche déchirerait, mais qu’il n’y a pas de risque d’explosion. On ne fait pas de méthanisation avec des pétales de roses. On assume totalement le fait que l’on transporte des fumiers que cela sente la ferme. On fait attention aux vents dominants. Et on l’assume. Tout en étant vigilants. Par exemple, quand il y a une réunion sur l’hippodrome de Meslay, avec une forte affluence, ces jours-là, on ne va pas rentrer des fumiers mal odorants. On fait attention. On est vigilant à l’acceptation de notre projet sur le territoire.
C’est pour cette vigilance aussi que vous impliquez bientôt ses écoliers...
B.D. : Nous invitons six classes les 3 et 4 décembre, en partenariat avec la Chambre d’agriculture. Ils suivront deux ateliers. L’un pour comprendre comment on fabrique du gaz à partir des effluents d’élevage. Dans l’autre atelier, ils participeront à la plantation de haies bocagères sur notre site. Notre site sera ainsi mieux intégré au paysage.
Si vous aviez un conseil pour celles et ceux qui se lancent dans la métha ?
B.D. : Restez décideurs chez vous et gardez votre indépendance. C’est ce qui nous a toujours guidés. Et c’est pourquoi nous, les 11 actionnaires de la holding, nous sommes majoritaires. C’est aussi pour cela que deux d’entre nous consacrent du temps à la gestion administrative et technique du site. Nous ne voulions pas dépendre d’un super-salarié ou d’un sous-traitant. Il faut absolument garder la main et savoir s’entourer des bonnes compétences extérieures.