Les conditions climatiques très humides de l’hiver ont pu pénaliser la survie des larves en diapause, sensibles à l’excès d’eau. Toutefois, l’été chaud précédent avait permis le développement d’une 2e génération, renforçant les populations. Par ailleurs, les températures excédentaires observées depuis le début de l’année ont précocité l’émergence des papillons d’une quinzaine de jours : il ne faut donc pas se caler sur des dates « habituelles » pour intervenir le cas échéant, mais bien suivre la dynamique des vols indiquée par les réseaux de piégeage.
Attention vols précoces observés
Les cumuls de températures excédentaires observés depuis le début de l’année (lire le graphique 1) ont pour conséquence des vols précoces, en avance de 15 jours par rapport à l’an dernier (vols encore plus précoces qu’en 2011), ce que révèlent les réseaux de piégeage (Bulletin de Santé du Végétal, entre autres). Les premières captures de pyrales ont eu lieu en sud Vendée en semaine 19 (début mai) et en semaine 20 (mi-mai) pour la sésamie.
Foreurs : des impacts sur le rendement et la qualité
Pyrales et sésamies sont aujourd’hui présentes sur l’ensemble du territoire des Pays de la Loire. Leurs larves sont régulièrement responsables d’importants dégâts lorsqu’elles ne sont pas contrôlées, l’impact sur la production pouvant être à la fois quantitatif et qualitatif. En creusant des galeries dans les tiges, les larves entraînent casse et verse des plantes. Elles consomment également les épis, ce qui peut provoquer leur chute, et de ce fait, des pertes directes sur le rendement.
Sur le maïs grain, la nuisibilité moyenne a été estimée à 7 % de pertes de rendement par larve (ou galerie) par plante à la récolte (références Arvalis 1998-2015, Sud-Ouest, Centre et Alsace, 1 ou 2 générations).
Sur le maïs fourrage, le lien entre le niveau d’attaque et la nuisibilité est plus difficile à établir. Néanmoins, sur dix essais en situation de pression moyenne (Arvalis 2015-2019, Ouest, 1 génération), des pertes de l’ordre de 5 % ont été enregistrées en l’absence de traitement, soit 750 kg de MS pour un maïs à 15 t MS/ha. Les niveaux de pertes peuvent s’élever à 1 tMS/ha en situation de forte infestation.
Pyrales et sésamies sont également susceptibles de provoquer des dégâts indirects, en dégradant la qualité sanitaire des grains ou du fourrage. En effet, les galeries creusées par les larves constituent des portes d’entrée pour des champignons du genre Fusarium, responsables du développement de mycotoxines. Ce phénomène est amplifié lorsque la deuxième génération se développe sur les épis. Les dégâts sont souvent moins importants en maïs fourrage compte tenu de la précocité de la récolte.
Raisonner la lutte
La lutte est avant tout préventive et passe par une bonne gestion des résidus de récolte (broyage et enfouissement). Dans les situations les plus à risques, cela peut ne pas suffire et une intervention peut être justifiée. Cela concerne en priorité les parcelles dans un secteur avec un historique de dégâts importants, les parcelles en succession maïs/maïs, avec une gestion insuffisante des résidus (cas des récoltes tardives en 2019 du fait des conditions très pluvieuses à la récolte). Les parcelles à proximité de zones enherbées et de jachère sont également considérées à risque (zone de refuge des papillons qui viennent pondre dans les maïs).
Date d’intervention et solution retenue
La période optimale d’application d’un produit insecticide en végétation doit être calée sur le vol des papillons, indépendamment du stade du maïs. Les informations sur les dynamiques de vol des ravageurs sont fournies par le réseau d’observation du BSV et d’autres réseaux.
Les modèles de prévisions, basés sur les cumuls de températures, ou les suivis de chrysalidation des larves permettent d’anticiper le début de vol.
La pose de pièges (sexuels à phéromones ou lumineux) permet d’établir une courbe de vol, avec un pic, pour aider à positionner les interventions.
Vis-à-vis de la pyrale, deux techniques de lutte sont envisageables : une solution de biocontrôle, les trichogrammes, ou des insecticides de synthèse. Quelle que soit la technique utilisée, son efficacité dépendra du bon positionnement du produit :
Les trichogrammes visent les premières pontes de pyrales (la larve du parasite se développe dans l’œuf de pyrale). Ils doivent donc être positionnés en début de vol de papillons. Attention : les trichogrammes sont inefficaces sur sésamie ! Les trichogrammes sont naturellement plus sensibles aux conditions d’application. Au contact du sol, exposés à la chaleur, leur efficacité peut être fortement réduite. En cas de lâchers précoces, sur des maïs peu développés, les diffuseurs doivent être accrochés sur des tuteurs ou protégés par un étui. Dans le cas de lâchers sur maïs peu couvrants, la forme capsule est déconseillée.
Les insecticides foliaires ont une action essentiellement larvicide. Ils doivent donc être positionnés au plus proche du pic de vol afin de toucher le plus grand nombre de larves possible, lors de leurs stades baladeurs. Le chlorantraniloprole (Coragen) a une action larvicide et ovicide sur pyrale, ce qui lui confère une plus grande souplesse de positionnement en comparaison aux pyrthrinoïdes.
Vis-à-vis de la sésamie, la lutte est plus délicate, car les papillons déposent leurs œufs dans les gaines de feuilles, ils ne sont donc pas ou peu accessibles à la pulvérisation foliaire. De même, lors de leurs premiers stades, les jeunes larves restent dissimulées. De plus, le piégeage difficile de ces papillons rend délicat le suivi du pic de vol. Celui-ci est en général un peu plus précoce que celui de la pyrale en 1re génération.
Souvent deux générations…
À la faveur des étés chauds que nous connaissons ces dernières années, on observe très régulièrement une 2e génération de pyrales et de sésamies du début à la mi-août, y compris au nord de la Loire. Les secteurs désormais concernés par cette 2e génération sont les départements 85, 44, 49 et le sud 72. Cette 2e génération est bien souvent plus préjudiciable avec une plus forte population de chenilles. Dans l’idéal, dans les secteurs régulièrement fortement impactés, il faudrait intervenir à nouveau sur cette population de chenilles au cours de l’été. Cela est envisageable avec des trichogrammes, mais suppose d’être équipé d’un enjambeur si le traitement est un produit foliaire.