LGV : une enquête sur la perception des paysages en 2020
Deux ans après la mise en service de la ligne à grande vitesse, se tenait à Louverné, le colloque de l’observatoire environnemental de la LGV. Pour la Sncf et Eiffage, les engagements ont été tenus, mais une étude paysagère va être lancée l’an prochain.

« Nous sommes agriculteurs de base et nous vous avons déjà contactés à propos de l’échec des haies. Chez moi, 2,7 km de haies ont été replantés après les travaux de la LGV et entre 50 et 8à % des arbres ont été détruits par les chevreuils et les sangliers. Comment cela est-il pris en compte dans vos analyses environnementales ? » La question a été posée par Claude Gendron, adhérent de l’Ade 53, l’association des expropriés par la création de la ligne à grande vitesse. Pour Jacques Baudry, directeur de recherche Inra et spécialiste de la haie bocagère : « Il faudra aller voir au cas par cas. Cela pose la question de la gestion des haies et boisements de long de la LGV », avec, comme l’expert le remarque, « des chevreuils et sangliers qui ont bien progressé ». Cet échange s’est tenu lors du colloque de l’Observatoire environnemental de la Lgv Bretagne Pays de la Loire, à Louverné, vendredi dernier. Un colloque au cours duquel le bilan intermédiaire, entre 1 et 3 ans après la mise en service, a été évoqué. Si l’on s’en tient aux propos de Stéphane Pradon, directeur environnement chez Egis, « les engagements ont été respectés ». Et de citer : « 27 km de protection acoustique, 118 km de linéaires de haies plantées, 91 ha de massifs ». Il note aussi « un bon fonctionnement » pour les 10 ouvrages où a été observée la faune terrestre et aquatique. À ce stade de l’après-mise en route de la LGV, « on satisfait aux exigences de la loi Loti », a souligné Virginie Fiorio, chargée de mission environnement pour la Sncf, qui ajoute : « si des mesures ne fonctionnent pas, on est capable de le dire aussi »…
Paysage vu et paysage vécu
Si deux intervenants, Guillaume Testud et Magali Perrin, sont venus parler, réciproquement des batraciens et des loutres — sans d’ailleurs soulever de grands problèmes de peuplement ou de déplacement depuis la LGV —, les propos de Caroline Guittet et de Mireille Falque, sur l’intégration paysagère, ont permis de prendre de la hauteur, avec pour le bilan à 5 ans, des rendus attendus qui concerneront, dans le détail, l’analyse paysagère à partir de comparaison de prises de vues. Une photothèque existe déjà. « Notre observation photographique du paysage (Opp) aide à analyser les changements de paysage, explique Caroline Guittet, nous travaillons depuis 2014 avec Eiffage. » Cette photothèque (500 clichés), réalisée à partir de 82 points de vue dans 35 communes, « va être mise à jour tous les deux ans ». Une convention entre l’Opp et Eiffage court jusqu’en 2022. « On va pouvoir se rendre compte de l’impact que les travaux ont pu avoir sur le paysage », détaille Mireille Falque. Avec, aussi, un comparatif possible avec les 70 ans de photographies aériennes de l’IGN. Mais le paysage, c’est aussi une représentation mentale. Pour analyser la manière dont les riverains de la LGV s’approprient ou pas ce nouveau paysage, en connaître leur ressenti, leur vécu, une enquête de terrain, par des interviews, va également être lancée. Là, « 9 sites ont été choisis avec des passages du train en remblais, en déblais… » Des sites qui correspondent aussi aux 4 unités paysagères traversées par la LGV. En Mayenne sont concernés « la vallée de la rivière la Mayenne à Changé » et « le secteur rural à dominante agricole » de La Cropte. Cette étude, de l’analyse photographique jusqu’aux entretiens individuels, sera réalisée en 2020. « Parfois, on a de bonnes surprises et des personnes qui s’approprient leur nouveau paysage », lance Mireille Falque.
« Éviter, réduire, compenser »
C’est le préfet du département, Jean-Francis Treffel qui a introduit le colloque. Un préfet qui a rappelé les avantages de la création de la LGV en termes de fréquentation des trains : « 2 300 000 voyageurs en plus depuis la LGV, soit 8 % d’augmentation en Pays de la Loire et 20 % sur l’axe Paris — Rennes ». Il remarque aussi que la LGV a « renforcé la fréquence des transports en Ter en libérant les lignes classiques ». Autre atout : « la création du pôle multimodale à Laval », avec « une offre de bus et d’autocars repensée depuis la LGV ». Le préfet est aussi revenu sur les nuisances sonores et les vibrations, rappelant que « des mesures ont été effectuées » et que « sur onze communes concernées en Mayenne, un seul point s’est révélé non conforme à la réglementation ». Enfin, il notera « l’originalité de la prise de l’environnement » avec trois maîtres-mots : « éviter, réduire, compenser », afin de protéger « la flore, la faune, le paysage ».