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Afdi 53 : pour les Congolaises victimes de guerre, l’espoir passe par l’agriculture

Jeudi 2 juin, l’Afdi 53 tenait son assemblée générale 2022 à la Maison des Agriculteurs, à Changé. L’association, qui soutient entre autres les femmes africaines victimes de violences de guerre, avait invité deux agricultrices de la RD Congo à témoigner, ainsi que leur mentor.   

De gauche à droite : Philomène et Judith, accompagnées par Pierre Lokeka, ont témoigné lors de l’assemblée générale de l’Afdi 53, devant une quinzaine de personnes.
© GM-Agri53

« C’est une association qui nous tient à cœur, qui nous passionne. Le fil rouge de cet après-midi est consacré à la République démocratique du Congo. Philomène, Judith et Pierre ont traversé une bonne partie du monde pour nous rejoindre », a déclaré Stéphane Guioullier, président de l’Afdi 53 et de la Chambre d’agriculture de la Mayenne, membre fondateur de l’association. Après le Burkina Faso et la Tunisie, la RDC est le troisième pays partenaire de « Agriculteurs français et développement international » de la Mayenne (Afdi 53). Pour rappel, l’association humanitaire, qui fêtait ses 40 ans en 2021, a pour mission le développement social et économique par l’agriculture.

 

Un pays qui tente de cicatriser

« Le début du partenariat avec la RDC remonte à 2020. Les premiers contacts avaient eu lieu en 2019. Contrairement à la Tunisie ou le Burkina Faso, l’Afdi Pays de la Loire était ignare sur la RDC. Tout était à faire », a rappelé Bertrand Métayer, animateur à l’Afdi Pays de la Loire. Depuis plus de 25 ans, la RDC, cet immense pays situé au cœur de l’Afrique (4 fois la France en superficie), est éprouvée par les guerres et les violences meurtrières. « Entre guerres, viols et famines, les victimes sont innombrables », a souligné Caroline Overgoor-Ba, animatrice Afdi Pays de la Loire. Dans la province du Sud-Kivu, 1 000 femmes victimes de violences de guerre se sont regroupées pour pratiquer une agriculture de subsistance afin de se réinsérer dans une société dont elles ont été exclues, suite aux sévices sexuels subis.

 

L’agriculture, synonyme d’espoir

« Nous accompagnons les femmes qui ont connu les affres de la guerre. Lorsqu’elle subit des sévices, tels qu’un viol, la femme est rejetée, abandonnée par son mari. En RDC, le viol n’est pas effectué pour le plaisir sexuel des brigands, mais comme une arme de guerre, car il détruit psychologiquement les femmes et désunit les familles. L’activité agricole est un moyen de leur redonner goût à la vie. Nous voulons redonner de l’espoir à ces femmes, et l’espoir passe par l’agriculture », a commenté Pierre Lokeka, coordonnateur au Centre Kitumaini, dont le but est de soutenir le bien-être et de faciliter la récupération émotionnelle de la population cible vivant dans les zones périurbaines et rurales de la province du Sud-Kivu. Selon Pierre Lokeka, une femme sur 30 serait victime de viol dans les zones peuplées. En revanche, en campagne, « ce sont presque toutes », regrette-t-il. « En 2010, les Nations unies ont déclaré Kivu comme la « capitale » mondiale du viol », a contextualisé Bertrand Métayer.    

 

La solidarité dans les champs

Judith est l’une des femmes qui ont été réinsérées par le Centre Kitumaini, organisme partenaire de l’Afdi Pays de la Loire. D’un calme déconcertant, elle a raconté son histoire lors de l’AG. Un récit glaçant : « J’ai subi des viols à deux reprises, en 1996 et en 2003. Mon mari m’a abandonné, moi et mes six enfants. J’ai cinq filles et un garçon, toutes mes filles ont été violées ». C’est grâce à l’agriculture que Judith a entrevu une lueur d’espoir et a réussi par se reconstruire, tant bien que mal. « Ce que j’aime, c’est la solidarité qu’il y a dans les champs. Le travail de groupe est plus efficace que le travail individuel. Cela permet de soulager la charge de travail. À dix femmes, on entre dans un champ et on finit le travail en une journée. Nous sommes ici aujourd’hui, mais le groupe est en train de travailler dans les champs en ce moment même ».     

 

La chèvre, symbole de réinsertion

Philomène, elle, a subi des viols à trois reprises. « Pendant cinq ans, j’étais comme une folle. Je n’avais plus d’espoir. Je voulais en finir avec la vie », se remémore-t-elle. Sa rencontre avec Pierre Lokeka a changé le cours de son existence. « Il m’a demandé : dis-moi ton problème et je vais t’aider. Grâce à lui, j’ai pu avoir de beaux habits, j’étais très fière. Mes enfants me disaient : « Tu as volé ». Mais non, c’est Pierre qui me les a donnés. Il me gâte trop, plus que les autres, je me sens même parfois mal à l’aise », a-t-elle raconté avec une émotion qui a envahi toute la salle. En RDC, la chèvre est un symbole de reconnaissance. C’est aussi en obtenant un caprin que Philomène a pu se réinsérer dans la société. « Quand une femme est violée, personne ne lui dit bonjour. C’est un paria, elle est inapprochable, maudite. Avec une chèvre, la joie et la fierté reviennent parmi nous. Grâce à la chèvre, une personne du quartier qui vous haïssait vous montre désormais du respect ».         

 

Une action « Offrez une chèvre »
Afin de permettre à une femme victime de violences de guerre au Sud-Kivu de sortir de l’extrême pauvreté, l’Afdi Pays de la Loire a lancé un nouveau programme de financements intitulé « Offrez une chèvre ». En 2021, 110 femmes ont bénéficié d’une première distribution de chèvres financée par l’association. Pour donner un coup d’accélérateur à cette action, l’Afdi lance un appel à don de chèvre. « La chèvre représente un capital pour la sécurisation de la famille. Ce petit élevage générera des revenus nécessaires pour payer la scolarisation des enfants, les soins de santé... », rappelle l’Afdi. Ainsi, un don de 50 euros équivaut à une chèvre (30 euros pour un chevreau). Si vous souhaitez participer, vous pouvez contacter l’association à afdi@pl.chambagri.fr ou au 02 41 18 61 80. « Il reste encore un mois de financement participatif. Aujourd’hui, en Pays de la Loire, nous en sommes à 5 000 euros de promesses de dons, soit 100 chèvres, dont 33 rien qu’en Mayenne », a affirmé Stéphane Guioullier. 
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