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Agriculteurs en difficulté : ne pas attendre pour se faire aider

La Fdsea soutient les agriculteurs en difficulté et les aide à sortir du tunnel. Un point avec la mission « Agri Dif ».

© VG

« La mission a commencé fin 2016 », raconte Jean-Louis Viot. Sa mission : « accompagner les agriculteurs en difficulté et trouver, avec eux, des solutions pérennes ». Cette commission « Agri Dif » de la Fdsea de la Mayenne s'appuie sur un réseau d'une quinzaine de membres « répartis équitablement sur le territoire », souligne celui qui la pilote. « On travaille avec tous les agriculteurs, adhérents ou non à la Fdsea », ajoute Jean-Louis. « Nous ne voulons laisser personne sur le côté de la route. » Alertés directement ou par un tiers, les membres de la commission, comme Jean-Louis Viot, partent d'abord à la rencontre d'agriculteurs dans la détresse à la fois morale et économique. « Nous apportons en premier un soutien moral et social. Nous rencontrons des personnes avec beaucoup de fragilité. Dans un premier temps, elles ont besoin d'écoute. Puis, nous abordons les comptes, la situation économique familiale et celle de l'exploitation. À nous, avec eux, de trouver des solutions, à les faire réfléchir à leur exploitation, leurs pratiques agricoles à éventuellement changer, leur donner les éléments techniques pour redresser la barre. Nous mettons aussi tous les prestataires en relation pour arriver, par exemple, à étaler les dettes, à revoir les créances. » Des tables rondes sont organisées régulièrement afin de dresser un plan de sauvetage de l'exploitation, faire le point à des échéances précises, renégocier éventuellement avec les fournisseurs et les entreprises de services. La mission suit actuellement une quarantaine de dossiers. « La grande majorité va vers la poursuite de l'activité, les partenaires acceptant de laisser davantage de temps en étalant les dettes », souligne Jean-Louis Viot. C'est le cas, par exemple, d'un agriculteur qui avec 200 animaux ne s'en sortait plus. « Son atelier lait était rentable, très bien suivi », mais les ateliers vaches allaitantes et taurillons puisaient sans cesse dans la rentabilité de la partie laitière, « en raison des coûts alimentaires ». Jean-Louis Viot a donc proposé en partenariat avec la société de gestion de l'exploitant de ne conserver que la production laitière. « Nous lui avons démontré qu'il arriverait au même EBE avec un seul atelier, en supprimant les deux autres et en augmentant ses cultures céréalières. » L'éleveur a suivi le conseil et devrait redresser la tête !

Pourtant, « pour quelques dossiers, il n'y a pas d'autre choix que la cessation d'activité, déplore-t-il. Quand c'est le cas, nous orientons les éleveurs vers les services de la Chambre d'agriculture pour qu'ils préparent leurs dossiers pour le tribunal. » Ces cas sont rares, heureusement. Mais ce que déplorent surtout les membres de la mission, c'est le temps que mettent parfois les agriculteurs à les contacter, « par peur, par repli sur soi quand tout va mal ». Jean-Louis Viot appelle donc les agriculteurs qui sont en situation difficile à contacter la Fdsea. « Aujourd'hui, j'ai le sentiment que plusieurs centaines d'exploitations sont en fragilité dans le département. Et plus on attend, plus les dettes s'accumulent. »

« Une lueur au fond du tunnel »

Tom et Cindy (prénoms d'emprunts) ont bien voulu témoigner anonymement pour expliquer comment la commission « Agri Dif » les aide depuis deux ans. Après un Gaec avec ses parents, dissous pour des questions de mésententes, Tom reprend l'exploitation familiale basée sur la production laitière. Cindy, qui travaillait dans le secteur des services non marchand, le rejoint quelques années plus tard. Mais les dettes s'accumulent. Les causes sont diverses : d'abord le passif du Gaec, puis le rachat des parts des parents. Un premier total de près de 400 000 EUR. Ensuite, le contrat laitier n'est plus atteint, car il a fallu décapitaliser, c'est-à-dire vendre des laitières pour payer les factures. Ensuite apparaissent des problèmes sanitaires : « la mortalité des veaux atteignait un sur cinq ». Une mortalité que l'éleveur impute à un achat de génisses lors du Gaec parents - fils. Un tracteur neuf, difficile à rembourser... « Pendant ce temps, on fait la sourde oreille, raconte Cindy. On craint tous les jours le facteur... » Le couple s'octroie difficilement 2000 EUR sur la paie de lait pour vivre avec ses deux enfants. Mais les non-paiements augmentent. Jusqu'au jour où la banque prend le dessus, et se rembourse une partie des prêts en prélevant directement sur le virement de la laiterie. « On descend vite la pente ! » Et puis, un jour, un huissier franchit le seuil de l'exploitation ! Sans doute le déclic pour ce couple qui, au bord de l'explosion familiale, va tout de même provoquer une concertation avec ses créanciers.

C'est ce jour-là qu'ils rencontrent Jean-Louis Viot, venu représenter la Fdsea à ce tour de table. Nous sommes en octobre 2017. Le syndicaliste prend les choses en mains, croit en l'avenir de l'exploitation dont les outils lui semblent tout à fait viables. Il croit aussi en cette famille. Après une analyse économique de l'exploitation, il ne voit qu'une solution : augmenter le cheptel pour atteindre les 800 000 litres. Il revoit avec les éleveurs quelques points de leur système. « Nous avons réévalué les rations que nous avions réduites pour moins dépenser. Nous avons acheté un taureau pour limiter les coûts d'insémination », énumère Tom. Mais pour atteindre le volume de production laitière, il a fallu trouver 26 000 EUR afin d'agrandir le bâtiment. « Un de nos fournisseurs a accepté, malgré nos dettes, de nous prêter l'argent. Nous avons construit l'extension et acheté des logettes et des cornadis d'occasion. » Quant aux vaches supplémentaires (45), elles sont louées auprès de Gestel. Une manière de pouvoir produire sans capitaliser. Depuis ce plan, les deux exploitants entrevoient le bout du tunnel, commencent à rembourser des dettes et continuent des points réguliers avec la Fdsea et leurs prestataires.

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