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Éric Thirouin, secrétaire général adjoint de la Fnsea : « Les agriculteurs sont exemplaires sur la transformation agroécologique »

Le comité d’orientation stratégique et de suivi (Cos) du plan national de réduction des produits phytopharmaceutiques, Ecophyto 2+, s’est réuni le 7 janvier. À cette occasion, le ministère de l’Agriculture a publié un bilan de la consommation des produits phytosanitaires en France en 2018. Le même jour, l’UIPP a présenté ses propres chiffres, sensiblement différents de ceux du ministère. La réaction d’Éric Thirouin, secrétaire général adjoint de la Fnsea et président du comité de pilotage du Contrat de solutions.

© AGPB

Comment expliquez-vous la différence de chiffres concernant la hausse des ventes sur les produits phytosanitaires en 2018 ?
Eric Thirouin : Effectivement, on s’aperçoit que ces chiffres, c’est tout et n’importe quoi. En fait, le plan Ecophyto a des indicateurs. Et nous constatons que, année après année, ces indicateurs sont tout, sauf cohérents par rapport à la réalité des exploitations. Je n’y comprends plus rien entre un ministère qui annonce + 21 %, et des fabricants, qui savent quand même de quoi ils parlent, qui annoncent + 8 %. Et surtout, on nous explique que la hausse de ces ventes est le fait des acheteurs qui ont devancé la hausse de la redevance pour pollution diffuse (Rpd). Mais cela n’a rien à voir avec l’utilisation.

Pour vous, cette hausse, traduit autre chose ?
E.T. : On sait qu’à l’intérieur de ces chiffres, sont comptabilisés le souffre et le cuivre qui sont en augmentation. Cela traduit donc que les agriculteurs sont en train de réduire l’usage des produits de phytosanitaires au profit des produits de biocontrôle dont l’unité n’est plus le gramme, mais le kilo. Les Ong environnementales ne devraient donc pas condamner cette évolution. D’ailleurs, le
ministère constate une baisse de 15 % de l’usage des produits CMR1* (les plus dangereux) et de 9 % pour les CMR2*. En 2018, il y a eu 13 % d’exploitations en agriculture biologique en plus par rapport à 2017 et 50 % d’augmentation du nombre d’exploitations engagées dans la certification environnementale. Plus on utilise des produits de biocontrôle, plus les volumes des ventes augmentent. C’est bien une absurdité d’avoir ces indicateurs, qui doivent être revus.

Les indicateurs ne sont-ils plus adaptés ?
E.T. : Au-delà de tous ces chiffres, on constate que nous, on n’y comprend plus rien dans ces indicateurs. Il faut remettre tout à plat. Le gouvernement a décidé de réunir un comité pour retravailler ces indicateurs. On voit très bien qu’ils sont complètement déconnectés de la réalité. Or la réalité, c’est que très concrètement, les agriculteurs ont changé leur pratique. On le voit tous les jours, et on le subit avec des charges supplémentaires sur nos exploitations. Pour nous, ça suffit. Il faut arrêter de nous mettre la pression, de nous mettre à l’index alors que nous sommes exemplaires en France sur la transformation agroécologique.

C’est notamment le cas avec le contrat de solutions ?
E.T. : Dans le cadre du contrat de solutions, les pratiques agricoles évoluent avec des solutions qui sont efficaces et rentables. Nous pouvons déjà présenter quatre indicateurs. Ainsi, sur les outils d’aides à la décision (Oad) qui permettent d’optimiser les traitements anti-mildiou en pommes de terre, on constate entre 2018 et 2019, une augmentation de 10 % des surfaces en pommes de terre qui sont couvertes par cet Oad. Cette augmentation des surfaces couvertes est de 14 % pour l’Oad permettant d’optimiser les traitements contre les maladies du blé. Les surfaces de betteraves cultivées avec des variétés tolérantes aux maladies sont en hausse de 8 %. Enfin, les surfaces de blé protégées par du soufre contre la septoriose ont été multipliées par deux en un an. C’était notre objectif pour 2025. Il a été atteint dès 2019. Tout cela confirme qu’il y a une véritable transformation agroécologique qui est opérée chez les agriculteurs. C’est cela que l’État doit reconnaître plutôt que de publier des indicateurs qui sont complètement désuets, et qui disent le contraire de la réalité. Ce dont nous avons besoin, ce sont d’indicateurs très concrets qui illustrent l’évolution des pratiques agricoles. Pour nous, c’est cela qui compte, plutôt qu’un indicateur fourre-tout qui suit autant la consommation de produits phytosanitaires que la consommation de produits de biocontrôles. Je pense véritablement qu’il faut changer d’indicateurs.

Un point vous a également choqué…
E.T. : Oui, lors de la réunion du Cos Ecophyto, j’ai été choqué que l’on ne parle pas d’économie. Fnsea et JA, nous nous sommes véritablement insurgés que l’on parle de réduction de produits
phytosanitaires et que, à aucun moment, on ne parle de l’impact, de comment accompagner les
agriculteurs. On voit bien qu’aujourd’hui, la politique environnementale et agricole du gouvernement, consiste à mettre des Znt, donc des retraits de surfaces de production, de mettre des taxes sous forme de Rpd, d’imaginer des contraintes avec, dans les mois qui viennent la séparation de la vente et du conseil, tout en faisant supporter le coût par les agriculteurs. Cela est totalement intolérable. Si l’on veut une transition agroécologique, elle doit être accompagnée financièrement, avec des allègements, avec des soutiens financiers, et non pas avec des charges supplémentaires comme c’est le cas aujourd’hui.

*Agents cancérogènes, mutagènes ou reprotoxiques. Ces baisses sont constatées en comparant deux périodes triennales 2009-2011 et 2016-2018.
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